Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux (L.C. 2013, ch. 20)
Texte complet :
Sanctionnée le 2013-06-19
Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux
L.C. 2013, ch. 20
Sanctionnée 2013-06-19
Loi concernant les foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et les droits ou intérêts matrimoniaux sur les constructions et terres situées dans ces réserves
SOMMAIRE
Le texte a pour objet l’adoption par les premières nations de textes législatifs — et l’établissement de règles provisoires de procédure ou autres — applicables, pendant la relation conjugale ou en cas d’échec de celle-ci ou de décès de l’un des époux ou conjoints de fait, en matière d’utilisation, d’occupation et de possession des foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et de partage de la valeur des droits ou intérêts que les époux ou conjoints de fait détiennent sur les constructions et terres situées dans ces réserves.
Préambule
Attendu :
qu’il est nécessaire de traiter de certaines questions qui se posent en matière de droit de la famille dans les réserves des premières nations, en raison du fait que les lois provinciales et territoriales régissant ces questions ne s’appliquent pas dans celles-ci et que la Loi sur les Indiens n’en traite pas;
qu’il est nécessaire de prendre des mesures pour accorder aux époux ou conjoints de fait, pendant la relation conjugale ou en cas d’échec de celle-ci ou de décès de l’un d’eux, des droits et des recours en ce qui touche :
l’utilisation, l’occupation et la possession des foyers familiaux situés dans les réserves, notamment l’occupation exclusive en cas de violence familiale,
le partage de la valeur des droits ou intérêts qu’ils détiennent sur les constructions et terres situées dans les réserves;
qu’il est important que, lorsque les époux ou conjoints de fait exercent ces droits et recours, l’autorité compétente saisie :
tienne compte de l’intérêt des enfants, notamment l’intérêt qu’ont les enfants membres des premières nations à maintenir des liens avec celles-ci,
soit renseignée par les premières nations sur le contexte culturel, social et juridique en l’espèce;
que le gouvernement du Canada a reconnu que le droit inhérent à l’autonomie gouvernementale constitue un droit ancestral et qu’il est d’avis que la meilleure façon de mettre en oeuvre ce droit est de procéder par négociation;
que la présente loi n’a pas pour but de définir la nature et l’étendue de tout droit à l’autonomie gouvernementale ou d’anticiper l’issue des négociations portant sur celle-ci;
que le Parlement du Canada souhaite promouvoir l’exercice, compatible avec la Loi constitutionnelle de 1982, du pouvoir des premières nations de prendre des textes législatifs en ce qui a trait aux foyers familiaux situés dans les réserves et aux droits ou intérêts matrimoniaux portant sur les constructions et terres situées dans ces réserves,
Sa Majesté, sur l’avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte :
TITRE ABRÉGÉ
Note marginale :Titre abrégé
1. Loi sur les foyers familiaux situés dans les réserves et les droits ou intérêts matrimoniaux.
DÉFINITIONS ET INTERPRÉTATION
Note marginale :Définitions
2. (1) Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.
« agent de la paix »
“peace officer”
« agent de la paix » Toute personne visée à l’alinéa c) de la définition de « agent de la paix » à l’article 2 du Code criminel.
« conseil »
“council”
« conseil » En ce qui touche une première nation, le conseil de la bande au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les Indiens.
« droit ou intérêt »
“interest or right”
« droit ou intérêt »
a) L’un ou l’autre des droits ou intérêts ci-après visés par la Loi sur les Indiens :
(i) le droit de possession — attesté ou non par un certificat de possession ou un certificat d’occupation — accordé conformément à l’article 20 de cette loi,
(ii) le permis visé au paragraphe 28(2) de cette loi,
(iii) le bail accordé en vertu des articles 53 ou 58 de cette loi;
b) le droit ou intérêt portant sur une terre de réserve assujettie à tout code foncier ou texte législatif au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la gestion des terres des premières nations, à tout texte législatif adopté en vertu d’un accord d’autonomie gouvernementale auquel Sa Majesté du chef du Canada est partie ou à tout code foncier ou toute loi des Mohawks de Kanesatake adoptés en vertu de la Loi sur le gouvernement du territoire provisoire de Kanesatake;
c) le droit ou intérêt portant sur une construction à caractère permanent ou non, située sur une terre de réserve — autre que la terre sur laquelle est détenu un droit ou intérêt visé à l’alinéa a) —, qui est reconnu soit par la première nation dans la réserve de laquelle est située la construction, soit par l’ordonnance prévue à l’article 48.
« droits ou intérêts matrimoniaux »
“matrimonial interests or rights”
« droits ou intérêts matrimoniaux » Les droits ou intérêts — autres que ceux sur le foyer familial — qu’au moins l’un des époux ou conjoints de fait détient et qui, selon le cas :
a) sont acquis pendant la relation conjugale;
b) sont acquis avant la relation conjugale mais en considération de celle-ci;
c) sont acquis avant la relation conjugale mais non en considération de celle-ci et se sont appréciés pendant celle-ci.
Sont exclus de la présente définition les droits ou intérêts qui sont reçus d’une personne à titre de don ou en raison d’un legs ou de toute autre transmission par droit de succession et ceux qui remontent à ces derniers.
« époux »
“spouse”
« époux » S’entend notamment de la personne qui a contracté de bonne foi un mariage nul de nullité relative ou absolue.
« foyer familial »
“family home”
« foyer familial » La construction à caractère permanent ou non, située dans la réserve, où les époux ou conjoints de fait résident habituellement ou, en cas de cessation de la cohabitation ou de décès de l’un d’eux, où ils résidaient habituellement à la date de la cessation ou du décès. Si la construction est aussi normalement utilisée à des fins autres que résidentielles, la présente définition vise uniquement la partie de la construction qui peut raisonnablement être considérée comme nécessaire aux fins résidentielles.
« juge désigné »
“designated judge”
« juge désigné » Dans le cas d’une province, l’une ou l’autre des personnes ci-après que le lieutenant-gouverneur en conseil de la province autorise à agir à ce titre pour l’application de la présente loi :
a) le juge de paix nommé par celui-ci;
b) le juge du tribunal de la province;
c) le juge du tribunal établi en application des lois de la province.
« membre de la première nation »
“First Nation member”
« membre de la première nation » Personne dont le nom apparaît sur la liste de bande de la première nation ou qui a droit à ce que son nom y figure.
« ministre »
“Minister”
« ministre » Le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien.
« première nation »
“First Nation”
« première nation » Bande au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur les Indiens.
« tribunal »
“court”
« tribunal » Sauf indication contraire, dans le cas d’une province, l’un des tribunaux énumérés aux alinéas a) à e) de la définition de « tribunal » au paragraphe 2(1) de la Loi sur le divorce.
Note marginale :Terminologie
(2) Sauf indication contraire du contexte, les autres termes de la présente loi s’entendent au sens de la Loi sur les Indiens.
Note marginale :Accords entre époux ou conjoints de fait
(3) Il est entendu que, pour l’application de la présente loi, est un accord conclu entre époux ou conjoints de fait l’accord conclu au moyen de mécanismes traditionnels de règlement des différends.
Note marginale :Ex-époux ou ex-conjoint de fait
(4) Pour l’application de la définition de « droits ou intérêts matrimoniaux » au paragraphe (1), du paragraphe (3), de l’article 6, des paragraphes 15(2), (4) et (5) et des articles 16, 20, 26, 28 à 33, 43, 45, 48, 49 et 54, est assimilé à l’époux ou conjoint de fait l’ex-époux ou ex-conjoint de fait.
Note marginale :Terminologie non limitative
(5) L’emploi du terme « demande » pour désigner une procédure engagée devant un tribunal en vertu de la présente loi n’a pas pour effet de limiter la procédure à cette désignation, ni aux modalités de forme ou autres que celle-ci implique, la procédure pouvant recevoir la désignation et suivre les modalités prévues par les règles de pratique et de procédure applicables à ce tribunal.
Note marginale :Kanesatake
(6) Pour l’application de la présente loi, la mention de « réserve » vaut également mention du territoire provisoire de Kanesatake au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur le gouvernement du territoire provisoire de Kanesatake.
SA MAJESTÉ
Note marginale :Obligation de Sa Majesté
3. La présente loi lie Sa Majesté du chef du Canada et des provinces.
OBJET ET APPLICATION
Note marginale :Objet
4. La présente loi a pour objet l’adoption par les premières nations de textes législatifs — et l’établissement de règles provisoires de procédure ou autres — applicables, pendant la relation conjugale ou en cas d’échec de celle-ci ou de décès de l’un des époux ou conjoints de fait, en matière d’utilisation, d’occupation et de possession des foyers familiaux situés dans les réserves des premières nations et de partage de la valeur des droits ou intérêts que les époux ou conjoints de fait détiennent sur les constructions et terres situées dans ces réserves.
Note marginale :Titre de propriété
5. Il est entendu que la présente loi n’a pas pour effet de modifier le titre de propriété des terres de réserve, celles-ci continuant d’être des terres réservées aux Indiens au sens du point 24 de l’article 91 de la Loi constitutionnelle de 1867 et mises de côté par Sa Majesté à l’usage et au profit de la première nation concernée.
Note marginale :Époux ou conjoints de fait
6. La présente loi ne s’applique aux époux ou conjoints de fait que si au moins l’un d’eux est membre d’une première nation ou Indien.
ADOPTION DE TEXTES LÉGISLATIFS PAR LES PREMIÈRES NATIONS
Pouvoir des premières nations
Note marginale :Pouvoir d’adopter des textes législatifs
7. (1) Toute première nation peut adopter des textes législatifs applicables, pendant la relation conjugale ou en cas d’échec de celle-ci ou de décès de l’un des époux ou conjoints de fait, en matière d’utilisation, d’occupation et de possession des foyers familiaux situés dans ses réserves et de partage de la valeur des droits ou intérêts que les époux ou conjoints de fait détiennent sur les constructions et terres situées dans ses réserves.
Note marginale :Contenu
(2) Les textes législatifs doivent prévoir la procédure permettant de les modifier et de les abroger, et peuvent contenir des dispositions en ce qui touche les questions suivantes :
a) l’application des textes législatifs;
b) malgré le paragraphe 89(1) de la Loi sur les Indiens, l’exécution, dans une réserve de la première nation, de toute ordonnance rendue même partiellement en vertu de ces textes ou de toute décision prise ou de tout accord conclu au titre de ceux-ci.
Note marginale :Avis au procureur général de la province
(3) Si la première nation a l’intention d’adopter des textes législatifs, le conseil en avise le procureur général de toute province dans laquelle est située une réserve de la première nation.
Note marginale :Loi sur les textes réglementaires
(4) Les textes législatifs sont soustraits à l’application de la Loi sur les textes réglementaires.
Consultation populaire
Note marginale :Approbation des membres
8. (1) Lorsqu’une première nation a l’intention d’adopter des textes législatifs en vertu de l’article 7, le conseil de la première nation soumet le projet de textes législatifs à l’approbation des membres de celle-ci.
Note marginale :Droit de vote
(2) Est habile à voter en ce qui touche cette approbation tout membre de la première nation âgé d’au moins dix-huit ans, qu’il réside ou non dans une réserve de celle-ci.
Note marginale :Devoir d’information
(3) Le conseil est tenu, avant de procéder à la consultation populaire, de prendre les mesures utiles — conformes aux usages de la première nation — pour retrouver tous les électeurs et les informer, d’une part, de leur droit de vote et des modalités d’exercice de ce droit et, d’autre part, de la teneur du projet de textes législatifs.
Note marginale :Préavis
(4) Il fait publier un avis des date, heure et lieu du scrutin.
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